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Les Combats de la Sidi Brahim

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Pour la première fois un nom et une date qui ne sont pas un nom ni une date de victoire flamboient dans le pli d'un drapeau. Et quel Drapeau ! L'unique emblème des Bataillons de Chasseurs à pied.​Pourquoi cette exception ? Pourquoi ce précédent ? C'est que les hommes qui avaient pris part à ces combats avaient dépassé les limites de la bravoure et de l'abnégation.

 

 
Le 21 septembre 1845 au soir, le Lieutenant-Colonel de MONTAGNAC, Commandant Supérieur de DJEMMA GHAZAOUET (NEMOURS actuel) part en colonne le 8éme Bataillon de Chasseurs d'Orléans et deux pelotons du 2éme Hussard, pour protéger au Sud-Ouest de son territoire la tribu des Souhalias, inquiétée par les tribus dissidentes voisines et par l'arrivée du Maroc d'ABD EL KADER.

Parvenu le 22 Septembre dans l'après-midi aux abords de SADI MOUSSA, le Lieutenant-Colonel de MONTAGNAC est averti de la présence, face à lui, d'un fort parti de cavaliers de l'ennemi soutenu par deux à trois mille irréguliers.

Décidé à jouer d'audace, MONTAGNAC aborde à six heures. au matin du 23 Septembre, les pentes du Djebel Kerbour. Il laisse à la garde du bivouac deux compagnies de Chasseurs. Le combat s'engage immédiatement, les cavaliers de l'émir surgissent de toutes parts et bousculent les soixante-sept hussards de MONTAGNAC lancés à la charge. Les Chasseurs forment le carré, ils luttent à dix contre un.

A 8 heures, le Lieutenant-Colonel de MONTAGNAC est tué ; à 9 heures, les deux pelotons de Hussards, les 3éme, 6éme, 7éme compagnies du 8éme Chasseurs sont anéanties. Cinq officiers sont tués. Marchant aussitôt au feu, les deux compagnies de réserve, sous les ordres du Chef de Bataillon FROMENT-COSTE, sont bientôt elles-mêmes submergées. Le Commandant est tué, la 2éme compagnie est écrasée au sud du bivouac, le Capitaine DUTERTRE et le clairon ROLLAND blessés, sont fait prisonniers. Les éléments de garde au bivouac (Cne de GEREAUX) parviennent à se retrancher à 11 heures, dans le marabout de Sidi-Brahim, petite construction de torchis entourée d'une murette de 1.50 mètre de hauteur. Ce détachement compte alors, le Capitaine de GEREAUX, le Lieutenant de CHAPPEDELAINE, le médecin ROSAGUTI. l'interprète LEVY et soixante-dix-huit Chasseurs.
 
 
Le Capitaine de GEREAUX ordonne de hisser un Drapeau sur le marabout ; comme il n'y en a pas, les hommes se hâtent d'en fabriquer un. Le Lieutenant de CHAPPEDELAINE donne un morceau de sa ceinture rouge, le Caporal LAVAYSSIERE sa cravate bleue de Chasseur, on y joint un mouchoir blanc et voilà les trois couleurs assemblées. Il manque une hampe. On prend un des roseaux qui étaient là, celui qui ne servait pas de boîte à lettres, on fixe le drapeau à son extrémité et le carabinier STRAPPONI monte attacher au haut d'un des figuiers le glorieux emblème de la Patrie. Une grêle de balles accueille l'apparition du brave carabinier
STRAPPONI ne s'émeut pas, il s'acquitte de sa périlleuse mission sans être atteint et fait flotter le Drapeau au-dessus du Marabout et de ses défenseurs.
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Pendant toute la journée du 23 Septembre, les Chasseurs soutiennent un assaut continu, refusant de répondre aux sommations d'ABD EL KADER lui-même. Celui-ci fait venir le Capitaine DUTERTRE blessé et prisonnier et lui dit :

" Va exhorter les tiens à se rendre. S'ils obéissent, ils auront la vie sauve ainsi que toi,  sinon ils périront tous. Je te ferai trancher la tête et je donnerai ton cœur à mes chiens. "

DUTERTRE s'avance vers le Marabout et crie :

" Chasseurs, on va me tuer si vous ne vous rendez pas. Je viens vous dire de vous défendre jusqu'à la mort."
L'ennemi tient parole, et bientôt la tête de DUTERTRE est promenée au bout d'une lance autour du Marabout. ABD EL KADER fait venir le clairon ROLLAND.

" Approche, lui dit-il, et sonne la retraite. "

ROLLAND s'approche et de tout son souffle sonne la charge.

Les combats reprennent acharnés, jusqu'au 25 Septembre.

A plusieurs reprises, l'ennemi lassé, demande une trêve pour enlever ses morts et ses blessés sous le mur du Marabout.

Le 26 Septembre, ne comptant plus sur aucun secours, à bout de munitions, tenaillé par la soif et la faim, GEREAUX décide de tenter une sortie vers Djemma Ghazaouet. Groupés en carré autour de leur drapeau de fortune, les trente survivants tous blessés s'élancent hors du Marabout. Ils luttent pied à pied, à l'arme blanche et parviennent en ordre jusqu'à l'oued EI-Mara. Mourant de soif ils s'y arrêtent un moment pour boire. Environnés aussitôt par une nuée d'ennemis, les restes de la compagnie de GEREAUX sont alors massacrés au bord de l'oued, à 3 km du poste. Seuls, le Caporal LAVAYSSIERE, avec son arme, et onze Chasseurs réussiront à l'atteindre. Cinq meurent d'épuisement dans les heures qui suivent.
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(Texte approuvé par le Service Historique de l'Armée)​
Titre 6
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